La collection de cédéroms "l'art pour l'âme"

 

L'abbe de Malleray presente les cd-roms "L'art pour l'ame" au Cardinal Murphy-O'Connor, archeveque de Westminster.

 

Des enfants decouvrent le nouveau cd-rom "Renaissance Italienne".

 

L'abbé de Malleray remercie le Cardinal Castrillon-Hoyos,
Préfet de la Congrégation pour le Clergé, de sa lettre du 16 juin 2001 commentant La Tour, l'art pour l'âme.

 

Lettres du Cardinal Paul POUPARD, président du Conseil Pontifical de la Culture

 

Hiérarchie des signes

Par les commentaires mis en scène dans ces cédéroms de la collection L'art pour l'âme, nous souhaitons partager avec vous un temps de contemplation, une émotion esthétique : voir ensemble battre... le cœur du tableau.

Pour nous y préparer, retenons qu'il est une hiérarchie des signes. Comme nos yeux perçoivent un dégradé de couleurs, ainsi notre raison doit considérer la gradation des preuves. Attendre de toutes un degré uniforme d'autorité, ce serait vouloir que toutes les teintes de l'arc-en-ciel ...soient blanches. Heureuses nuances, qui donnent au spectacle sa profondeur et son âme.

Mais le peintre?

"Certes ; mais le peintre : a-t-il voulu dire tout ce que nous voyons?" Spontanément, le bon sens nous fait poser une telle question. Après avoir vu fonctionner le bel organisme peint, après en avoir apprécié l'équilibre et le rythme, brusquement l'on s'inquiète, comme d'un sortilège : tout cela est-il vrai, ne m'a-t-on pas trompé? N'est-ce pas... trop beau pour être?

Pour commencer, on doit remarquer que si La Tour ou Caravage nous intéressent, c'est parce qu'ils sont peintres, et pas critiques d'art. C'est à des tableaux qu'ils doivent leurs renommées, pas à des écrits. Dante pas davantage ne nous a légué une somme critique de sa "Comédie". Un premier débat est donc le statut même et le bien fondé de tout commentaire. Une Pietà de Michel-Ange, un Requiem de Mozart, un Port de mer du Lorrain ne se suffisent-ils pas à eux-même? Est-il besoin de commenter?

Il faut rappeler ensuite qu'aucun commentaire ne doit méconnaître l'intention de l'auteur, qu'il soit sculpteur, poète, compositeur, peintre, etc. Celle-ci est un critère déterminant. Encore doit-elle être exprimée. A moins qu'il n'ait lui-même rédigé le commentaire intégral de son oeuvre, mentionnant le sens précis et exclusif de chaque détail, l'artiste laisse à tout spectateur une certaine marge d'interprétation. Des usages, des codes et des normes propres à chaque art et au contexte historique auquel appartient l'oeuvre fournissent le cadre plus ou moins flexible de l'interprétation. Ils ne remplacent pas cependant celle que l'artiste n'aurait pas léguée avec la minutie et l'authenticité requises.

Création

Enfin, l'artiste est lui-même interprète d'une réalité qu'il n'a pas créée : tel paysage ; tel visage ; telle bataille... On juge de la vérité d'une oeuvre à sa ressemblance avec l'original : non par un mimétisme photographique, mais par une aptitude à révéler l'essence du sujet. Sous ce rapport, artiste et critique ont même liberté et même responsabilité : Diderot ou Baudelaire commentant telle nature morte ou telle scène de genre s'intéressent au tableau comme le peintre a dû s'intéresser au spectacle réel - empilement de fruits ou leçon de musique - qu'il avait sous les yeux. Faut-il donc s'étonner qu'un Baudelaire, un Malraux selon leur inclination choisissent d'orienter leurs commentaires dans un sens qui leur est cher, quand déjà les peintres ont laissé dans l'ombre plusieurs aspects du modèle à reproduire, pour valoriser tels autres selon leur inspiration? "C'est, dira-t-on, qu'une intelligence a conçu le tableau, dont le dessein oblige le critique, alors que ce paysage, ce visage..." ...N'obligeraient pas le peintre? Nulle intelligence n'aurait conçu le spectacle des flots écumants, aucun Esprit n'aurait créé la féérie d'un soleil couchant sur un visage aimé? D'où viennent-ils alors?

Chrétien

Ces observations concernent l'art et la critique d'art en général. Précisons maintenant notre rapport à l'art chrétien en particulier. Si de tout artiste on attend qu'il nous aide à déchiffrer le monde, dont il n'est pas l'auteur, à l'artiste chrétien plus encore on demande qu'il peigne avec fidélité le Dessein que Dieu Seul a révélé aux hommes. Par excellence, l'art chrétien est prière et service.

Ce critère l'emporte. L'audace de la composition, la force du trait, l'éclat des couleurs ne sauraient rendre chrétienne une toile empreinte d'ignorance ou d'irrespect de la doctrine chrétienne. La technique, le talent, le génie, tous dons de Dieu sont bienvenus pour illustrer les scènes de l'Histoire Sainte et les vérités de la Foi catholique, mais ils ne peuvent compenser l'indifférence ou l'impiété du peintre mécréant. Nous l'osons dire : une fresque maladroite, un naïf ex-voto, une sculpture un peu gauche, lorsque les anime un désir sincère d'exprimer la piété de l'auteur en évitant la laideur et l'erreur - appartiennent à l'art chrétien. En revanche, nombre d'œuvres réputées "chrétiennes" d'artistes célèbres demeurent étrangères à cet art, faute de Foi. Elles sont brillantes, elles sont ingénieuses, émouvantes parfois. Mais chrétiennes?

L'art pour l'âme

Notre Collection "L'art pour l'âme" revendique précisément ce droit pour tout public de "lire en chrétien" les représentations de sujets chrétiens. Avec nous des flâneurs prendront plaisir à promener sur les toiles de La Tour et Caravage ce "prisme" éclairant de la Foi catholique, qui leur découvrira des aspects inconnus de la composition et, pour la joie de leur intelligence, fera fonctionner sous leurs yeux ces tableaux géniaux comme de puissants systèmes de sens.

Les curieux quant à eux, s'étonnant d'une si riche correspondance entre la Foi et le tableau, mesureront la profondeur de ce familier macrocosme : l'ordre chrétien. Doctrine et Histoire saintes composent un univers vibrant de tant d'informations, de symboles et d'indices ; le jeu de leurs contrastes et de leurs symétries éveille tant d'échos dans la raison de l'homme et dans son cœur ; enfin dans ce réseau fraternisent tant de pensées limpides, tant de faits héroïques et tant d'œuvres sublimes comme autant de rimes si l'on est poète ou comme les figures d'une chorégraphie - qu'en peindre un détail, c'est toucher l'ensemble! Illustrer le moindre élément du Catholicisme, c'est inscrire son oeuvre dans un Tableau plus grand et plus beau : peindre en chrétien, ce n'est pas créer, mais cadrer.

Cadrage

Si donc La Tour et Caravage attirent notre attention sur tel plan de l'immense fresque de l'Histoire sainte, la pertinence de leur cadrage se juge à la qualité des liens qu'entretient leur extrait avec le reste de cette même Histoire. Le tableau chrétien est une loupe arrêtée sur une Tapisserie : sous l'entrelacs particulier des couleurs à l'endroit choisi, il doit révéler comme en filigrane le dessin typique de l'entière Trame du salut. La puissance de l'œuvre tient dans ce rapport entre l'élément et le tout, dans l'économie d'un cadrage resserré sur quelques signes - expressément choisis et disposés selon leur aptitude à suggérer l'ensemble. De ce pouvoir d'évocation du tout par la partie résulte une densité de sens inégalable, due à l'immensité en nombre et en valeur des signes composant l'univers catholique, ainsi qu'à l'essentielle unité d'où il procède.

De la sorte, dans le déroulement historique de la vie du Christ, l'Heure de Sa Passion convoque d'une part en les accomplissant les innombrables prophéties données des siècles et des millénaires auparavant ; et d'autre part, en les annonçant, les étapes futures de la libération des élus jusqu'à la consommation des âges. Dans sa brièveté, cet Evénement actue un réseau universel de significations à travers l'espace et le temps. Il constitue le seul "Tableau" dont la richesse informative soit infinie.

Le Corps

Or les tableaux chrétiens, oeuvres de peintres, imitent ce divin Modèle :« En réalité, l'art chrétien ne peut être mesuré que par une inspiration chrétienne et relève avant tout d'une attitude contemplative, puisqu'il est mesuré par la contemplation du corps glorieux du Christ qui contient et récapitule en lui tout l'univers» (cf Marie-Dominique Philippe, Philosophie de l'art, t.II p. 51, Editions Universitaires, Fribourg, 1994). Le "corps glorieux" du Christ, cette Chair sainte et immortelle par laquelle Dieu fait Homme affirme Sa Victoire et dit notre Salut, est le terme vers lequel implicitement tend toute représentation chrétienne. Elle a pour terme explicite le "corps mystique" du Christ, cette réunion de tous les chrétiens par un même Esprit dans l'unique Eglise comme les membres d'un seul corps.

Ainsi par exemple dans les trois tableaux  de notre cédérom sur Caravage , celui-ci nous peint le corps mystique du Christ à trois étapes de son développement. Au cours de son implantation tout d'abord : la Vocation de saint Matthieu représente l'érection de l'une des douze colonnes, les douze Apôtres, sur lesquelles repose l'Eglise. La Cène d'Emmaüs ensuite, par la conversion des deux pèlerins le jour de Pâques, illustre la croissance du corps mystique à partir de la Résurrection du Christ. Le Crucifiement de saint Pierre enfin, révèle l'immortalité de cet organisme spirituel, fortifié non pas ruiné par la perte physique de son chef terrestre. De "Matthieu" à "Pierre" en passant par "Emmaüs", Caravage modifie trois fois son cadrage pour nous faire admirer cette mystique Anatomie selon trois plans complémentaires : l'ossature (l'un des douze Apôtres) ; les muscles (deux des nombreux disciples) ; le cerveau (le chef dans l'acte essentiel du témoignage).

Par la foi

La Tour et Caravage furent-ils conscients de ce lien organique? Autant ils ont cru, autant ils ont su. Autant ils ont cru que Jésus-Christ est vraiment Dieu fait Homme, mort et ressuscité pour sauver du péché la descendance entière d'Adam et d'Eve, autant ils ont su l'unité spirituelle de ses tableaux chrétiens. Répétons-le : Dieu Seul connaît la foi de ces grands peintres ; nous savons leurs vies. Et voyant leurs toiles nous pouvons conclure : celles du moins que nous examinons ici parlent du Christ en Son corps ou physique ou mystique avec trop d'éloquence pour être profanes. Elles sont donc chrétiennes. Dans l'art chrétien en effet, l'auteur s'efface devant le Destinataire divin. Son oeuvre ne lui appartient plus dès lors qu'elle prétend traiter de Celui par Qui tout existe.

Dessein

On n'en peut conclure qu'au moindre élément du tableau - un bâton, une fenêtre, un caillou... - le peintre ait attaché une signification univoque. Les formes peintes, plus encore que les mots, renvoient à des réalités diverses : un poème n'est pas composé comme un dictionnaire, ni un tableau chrétien comme un catéchisme par questions et réponses. Le charme et l'intérêt d'une oeuvre d'art, littéraire autant que picturale, consistent dans son pouvoir d'évocation. Cela suppose que chaque mot tracé comme chaque objet peint signifie davantage que sa définition dans un lexique ou dans un répertoire. Sinon, le poète aurait été grammairien, le peintre critique d'art.

Prémisses

Or la foi en Jésus-Christ, Vérité incréée, assure au croyant la connaissance virtuelle de toutes les vérités partielles. Qu'elles soient scripturaires, scientifiques, théologiques, etc., toutes sont données dans le Christ bientôt contemplé pour un face à face éternel au Paradis. Dans les tableaux étudiés, le spectateur chrétien recherche les prémisses de cette Vision. Il observe comment le cadrage, l'échelle ou le grossissement particulier choisi par le peintre active des arborescences plus ou moins précises du Corps mystique. Il faut le dire : le regard chrétien sur l'art ne tend pas vers l'art, mais vers le Christ. Aussi n'existe-t-il pas d'"artistes chrétiens", mais des chrétiens qui sont "artistes". C'est l'orientation de notre collection de cédéroms "L'art pour l'âme" : puisse-t-elle plaire à votre âme!

Ardeam, 15 août, a.D.2001.

 






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Dernière mise à jour le 1er nov. 2005.